IL y en a qui, dans le trafic de matériel, n'ont pas froid aux yeux. Par exemple chez Baxi France, spécialiste de la chaudière. Une entreprise pas très en forme et siphonnée depuis quelques années par des chineurs du dimanche ou du lundi.
Ce que l'on va appeler l'affaire Baxi, affaire révélée par l'union dans ses dernières éditions, carbonise tranquillement depuis un mois la vie de famille d'une volée d'employés de la célèbre entreprise. Ceux sur lesquels se penchent les enquêteurs de police de Soissons et le vice-procureur de Valroger. Les premières auditions ont débuté en avril. En mai et juin, six salariés, un du site de stockage de Villers-Cotterêts et cinq de Soissons, ont été placés en garde à vue et mis à pied par leur chère direction. Depuis, le commandant Sailly, le patron des policiers vissés sur le dossier, est devenu un spécialiste des chaudières sol, de celles à condensation et surtout des accessoires qui vont avec.
Le dossier s'épaissit jour après jour. Le parquet de Soissons a ouvert une information judiciaire pour identifier les acteurs du vaste réseau qui manœuvrait, dans et en dehors de Baxi et de Focast, pour détourner, transporter et installer chez des particuliers des petits bijoux de technologie vendus sur catalogue entre 2 000 et 8 000 €. On a dit sur catalogue.
Ceux qui ont œuvré et dont la liste s'allonge, semaine après semaine, n'ont pas fait dans la demi-mesure. La semaine dernière, 170 < disparitions > de chaudières étaient recensées par les enquêteurs sur les trois dernières années. Certains de ces joyaux ont été retrouvés, photographiés et mis en vente sur les sites Internet, dont le plus connu, le Bon coin. Il a suffi aux policiers de singer un début de transaction pour coincer quelques intermédiaires.
Quant au reste… « Les chaudières qui tombent du camion chez Baxi, ça ne fait pas trois ans, confie un professionnel du chauffage. On en parle depuis toujours. J'ai un collègue qui est là depuis quinze ans et, depuis tout ce temps, il n'a pas arrêté d'entendre ces histoires ! »
C'est la direction qui va être contente… De ce côté-là, il ne faut pas compter sur Denis Lanier, le responsable du site de Soissons, pas plus que sur François Hiriart, le PDG de Baxi France au Blanc-Mesnil, pour se fendre d'un commencement d'explication. Il faut dire que ces derniers ont de quoi avoir mal au crâne.
Comment une soixantaine de chaudières en 2009 et plus de cent l'année suivante ont-elles pu être exfiltrées des stocks et de la comptabilité de l'entreprise ? Pourquoi la direction ne s'est-elle pas alertée et n'a-t-elle pas déposé plainte plus tôt que l'année dernière ? Il y a un homme qui peut mettre les enquêteurs sur une piste amusante. C'est un commercial, il n'est plus dans le secteur, mais il y a quatre ans, il a senti qu'une part du flux lui filait entre les doigts. « Il ne parvenait pas à faire son chiffre et il s'est rapidement rapproché de sa hiérarchie pour lui faire part de ses interrogations, résume un installateur, mais ça n'a pas déclenché tout de suite, en haut lieu. Bizarrement, ce type, qui bossait très bien, a été muté il y a deux ou trois ans. » Celui-là a reçu des consignes extrêmement claires de sa hiérarchie et ne s'est plus exprimé depuis qu'il a quitté la région.
« Si ce trafic a pu se dérouler, c'est parce que la direction, précisément, a laissé plusieurs ateliers sans agent de maîtrise. C'est de sa faute, tonne un syndicaliste CFTC. Au début, ce sont quelques pauvres bougres qui se sont payés comme ça en détournant du matériel, mais, aujourd'hui, ça prend une ampleur vraiment inquiétante. Il y a beaucoup de personnes touchées. Tout le monde craint pour son sort. »
La cupidité serait-elle un vice estampillé Baxi ? On va finir par se poser des questions, un an après le déclenchement d'une guerre au comité d'entreprise, guerre sur fond de détournement, là encore, mais d'argent cette fois, argent dont le CE avait normalement le contrôle. Nul n'a été inquiété, mais Alain Butez, alors secrétaire de l'union locale CGT et secrétaire et trésorier du CE de Baxi pendant la période 2005-2008, a été sévèrement mis en cause, notamment par ses vis-à-vis CFTC qui l'ont finalement remplacé en 2008…
Pas folichon, le contexte syndical, d'autant que chez les industriels du détournement pistés par les enquêteurs, des employés cartés CFTC et CGT n'occuperaient pas les meilleures places sur le banc des innocents… « Ça va conduire à des licenciements pour faute grave et c'est à se demander si certains n'ont pas eu intérêt à fermer les yeux pour plomber l'entreprise ou préparer une charrette autrement que par un plan social. » Là encore, c'est un syndicaliste qui s'exprime. C'est aussi une particularité chez Baxi. Même les élus protègent leurs arrières. C'est dire si ça chauffe…http://www.lunion.presse.fr/article/aisne/trafic-chez-baxi-ca-durait-depuis-quinze-ans
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