mardi 4 octobre 2011

Première nuit en prison pour le commissaire Neyret

Après 96 heures passées en garde à vue, Michel Neyret, numéro 2 de la PJ lyonnaise, a été mis en examen lundi dans l'enquête sur des soupçons de  corruption, a indiqué l'un de ses avocats, Me Aurélie Sauvayre. Ses chefs d'inculpation comportent notamment la corruption, le trafic d'influence, l'association de malfaiteurs, le trafic de stupéfiants, le détournement de biens et violation de secret professionnel, ont précisé ses avocats lundi soir
Présenté à un juge des libertés et de la détention, le commissaire Neyret a été placé en détention provisoire lundi soir, conformément aux réquisitions du parquet. "Aujourd'hui, un grand serviteur de la République part en maison d'arrêt, un homme de terrain, le commissaire divisionnaire Neyret. Dès demain, nous relevons appel de la décision", a indiqué un autre de ses avocats, Me Versini-Bullara. "M. Neyret est affecté de partir en maison d'arrêt. Il ne renie pas pour autant son rôle dans la police nationale, il n'a pas voulu déshonorer la police", a ajouté l'avocat. "Il a embrassé ce corps noble de l'Etat, avec conviction, avec fougue et il le restera à tout jamais un policier même s'il ne l'est plus judiciairement et administrativement parlant", a-t-il ajouté.

"Il a la volonté réelle de démontrer qu'il n'est pas cet homme corrompu que d'aucuns ont voulu dépeindre, que certains délinquants de haut rang ont voulu stigmatiser. M. Neyret retrouvera son honneur et à sa dignité", a-t-il encore dit. M. Neyret "ne peut pas nier tout en bloc. Certaines choses sont inéluctables, il les reconnaît" notamment à propos du "traitement des sources, la capacité de financer le traitement de certains informateurs", a encore dit son défenseur, assurant que son client "n'était pas allé jusqu'à la connivence".

Outre Michel Neyret, quatre policiers étaient toujours en garde à vue lundi dans cette enquête. Il s'agit du patron de la Brigade de recherche et d'intervention (BRI) de Lyon, du chef de l'antenne grenobloise de la PJ, d'un commandant qui est son adjoint, et d'un autre commandant de la PJ. Il y avait sept policiers au total dimanche en garde à vue et deux ont été relâchés, a dit la même source.

Des indics rémunérés avec de la drogue L'enquête de la police des police (IGS) a mis au jour "un système" de détournement de drogue, dans lequel le numéro deux de la PJ de Lyon est soupçonné d'être impliqué, afin de rémunérer les indicateurs de police. Sur la base d'écoutes, les enquêteurs soupçonnaient Michel Neyret d'avoir détourné du cannabis avant son placement sous scellés ou sa destruction afin de rémunérer des informateurs ou pour le revendre. Selon l'une de ces écoutes, il se serait engagé à fournir 10 kilos de cannabis à l'un de ses indicateurs.

Ce système de détournement de drogue aurait été confirmé par les interrogatoires lors des gardes à vue, a indiqué lundi à l'AFP une source proche de l'enquête. D'autres auditions de policiers de la PJ étaient prévues ce lundi à l'IGS, a ajouté cette source, afin de corroborer ces éléments et "en mesurer l'ampleur".

Un voyage, des cadeaux....

Devant l'Inspection générale des services, Michel Neyret "a par ailleurs reconnu un voyage à Marrakech qu'il semble s'être fait offrir par Gilles Benichou", une figure de la nuit lyonnaise, qui se présente comme un acteur mais qu'une source proche de l'enquête dit lié au banditisme lyonnais. "Il a expliqué qu'à la question : Est-ce que j'ai donné des informations que seul un policier pouvait avoir ?, la réponse est oui", a indiqué dimanche une source proche du dossier. "Il a concédé que des choses laissaient penser qu'il avait pu être imprudent".

Gilles Benichou a été mis en examen samedi soir notamment pour corruption et trafic d'influence actif sur personne dépositaire de l'autorité publique. Il a été placé en détention provisoire. "Michel Neyret était ami avec Bénichou. Il l'a revendiqué", selon cette source proche du dossier. Ce serait donc par ces liens d'amitié que Michel Neyret expliquerait ses échanges avec Gilles Bénichou. "La question, glisse-t-on de source proche du dossier, est de savoir si ces liens d'amitié étaient aussi sincères d'un côté comme de l'autre".

Lors de sa garde à vue, Michel Neyret a également reconnu s'être fait offrir un séjour sur la Côte d'Azur. Sur cet aspect, un homme, arrêté à Cannes, a été mis en examen et écroué vendredi soir. Menant grand train, ce trentenaire est soupçonné d'avoir mis à la disposition du commissaire Neyret des véhicules de luxe de marque Ferrari ou Rolls Royce lors de séjours du policier sur la Côte d'Azur, selon une source judiciaire. Lors de sa garde à vue, Michel Neyret n'est pas allé jusqu'à reconnaître qu'il s'agissait de faits de corruption, invoquant son "amitié" avec Gilles Bénichou notamment, qui lui avait été présenté.

Premiers soupçons fin 2010

Les ennuis de ce haut gradé de la police, très bien considéré par sa hiérarchie, ont débuté quand plusieurs trafiquants présumés (également interpellés cette semaine) ont échappé à une descente de la brigade des stupéfiants parisienne, en novembre 2010, dans un appartement de Neuilly-Sur-Seine. Quelque 110 kilos de cocaïne avaient été saisis mais les enquêteurs s'étaient inquiétés de fuites.

Ces soupçons ont conduit en mai à l'ouverture d'une information judiciaire pour corruption active et passive, trafic d'influence et association de malfaiteurs. Elle a permis de remonter à Michel Neyret : son train de vie a été disséqué, tout comme ses échanges téléphoniques. Outre ses contacts avec des membres présumés du grand banditisme, ceux-ci ont fait apparaître des échanges avec des collègues lui demandant de faire passer "des trucs" susceptibles de rémunérer des indicateurs.
http://lci.tf1.fr/france/faits-divers/premiere-nuit-en-prison-pour-le-commissaire-neyret-6741815.html

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