Les clients se succèdent, ce samedi matin, et Sylvie raconte à chacun son histoire : « Hier, j'ai été agressée… » « Encore ! Mais ils ne vont jamais vous lâcher ! » La buraliste du quartier Caradoc vient de subir son deuxième vol à main armée en deux semaines, auxquels il faut ajouter une tentative de cambriolage. « C'est traumatisant, confie la victime. Je crois que ça va le rester un bon moment ».
La dernière agression s'est donc produite vendredi, « vers midi et quart ». « J'étais sur le palier du magasin, comme ça, j'allais rentrer le panneau publicitaire extérieur », décrit la dame âgée d'une quarantaine d'années. C'est là qu'un homme, qu'elle décrit jeune, a surgi. « Il avait son blouson remonté sur le nez et une capuche. Il a sorti un cutter. Un cutter orange. Et il m'a juste dit ''la caisse''. Je la lui ai donnée. Pas le choix. » Environ 150 euros.
« Pas dormi de la nuit »
L'après-midi, Sylvie n'ouvrira pas son tabac-presse. « J'étais choquée. Je le suis encore. Je n'ai pas dormi de la nuit. Je n'ai pas hésité à rouvrir samedi matin, mais j'avoue que j'ai peur au magasin. » Les clients écoutent son récit et pestent. L'un d'eux s'interroge : « Mais les voisins n'entendent rien ? »
Un autre constate la vitrine brisée, que protège une plaque de bois fixée en façade. « Qu'est-ce qui s'est passé, là ? » La buraliste malheureuse remonte le fil de sa sale semaine. « Ça, ça s'est passé dans la nuit de mercredi à jeudi. » Soit la veille de l'agression au cutter. « Le téléphone m'a réveillée à 5 heures du matin, c'était la police », relate la buraliste. L'agent au bout du fil l'informe de la tentative de cambriolage. Ses auteurs ont projeté une bouche d'égouts contre la baie vitrée. Celle-ci, pourtant sécurisée, menace de céder. « D'après ce que j'ai compris, il s'en est fallu de peu pour qu'ils la cassent vraiment pour entrer dans le magasin. »
La petite boutique de quartier semble clairement ciblée. Car le 3 novembre, Sylvie était encore victime d'un braquage, en plein jour. « C'était vers 9 h 30. J'étais dans l'arrière-boutique et quand j'en suis sortie, je me suis trouvée devant un homme qui avait avec une serviette sur la tête. Il m'a menacée avec une barre de fer. Il voulait la caisse. » Un complice est déjà en train de donner des coups de marteau sur la caisse enregistreuse. Ils repartiront avec 150 euros et quelques paquets de cigarettes. « Heureusement, je ne laisse qu'un minimum d'argent dans la caisse… »
Un client se demande si la police les a rattrapés. « Oui. Les deux. Il y en a un des deux qui n'a que 14 ans », raconte Sylvie. La procédure l'a déjà conduite à leur faire face, au tribunal correctionnel. « C'était un moment difficile de les avoir devant moi. Après coup, mon avocat m'a dit que j'avais de la peur dans les yeux. »
« Je me méfie »
Devant le comptoir du tabac-presse, les clients ont tous un mot sympathique pour Sylvie. Dans le quartier, tout le monde ou peu s'en faut connaît la buraliste, cette dame un peu fragile, dévouée à sa vieille mère, qui, depuis vingt-deux ans, tient son petit commerce. Jusqu'ici sans crainte, malgré quelques mésaventures antérieures. « J'ai peur maintenant. Ce matin tôt, un homme est arrivé en moto devant le magasin, il portait un casque et son écharpe le cachait. Je n'ai pas voulu lui ouvrir. »
Un adolescent vient d'acheter un paquet de cigarettes et salue. La commerçante s'approche de la fenêtre et s'assure discrètement qu'il s'éloigne de la boutique. « Je me méfie de tout le monde, c'est malheureux. »
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