C’était « l’hôpital du XXIe siècle » : ouvert en grande pompe à la fin de l’année 2000, l’Hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP), dans le XVe arrondissement de Paris, se présentait comme le navire amiral de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Quelques semaines à peine après sa mise en service, le bel oiseau était frappé en plein envol, touché par une épidémie de légionellose, cette bactérie se développant dans les réseaux sanitaires et qui peut être mortelle. Cinq patients de l’hôpital y ont trouvé la mort. L’épidémie avait duré plus d’un an.
Plus de onze ans après les faits et le dépôt de plaintes des proches des victimes, la juge d’instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy, chargée du dossier, vient de boucler l’enquête. Il appartient maintenant au parquet de Paris de donner son avis, ensuite, un procès devrait s’ouvrir contre les trois mises en examen : la société Cegelec-Dolbeau, qui a installé les tuyaux sanitaires, le bureau d’études Sogelerg, qui contrôlait les travaux, et l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris en tant que donneur d’ordres. Ils sont poursuivis pour « homicides involontaires » et « fautes caractérisées ».
En résumé, la juge s’est appuyée sur un rapport d’expertise particulièrement critique. La légionellose a pu se développer en raison du choix de la matière des tuyaux, de « l’acier galvanisé » très sensible à la corrosion.
L’acier des tuyaux mis en cause
De nombreuses malfaçons ont aussi été constatées. Pis, à plusieurs reprises, des signaux d’alarme avaient été tirés dès 1996 par le service de recherches et d’ingénierie en protection sanitaire de la Ville de Paris (Srips) à propos justement du choix de l’acier galvanisé, et de nouveau en 2000 sur le problème des malfaçons. Ni les entreprises ni l’AP-HP n’avaient pris en compte ces alertes. En 2005, l’AP-HP a tenté de se disculper en rejetant la faute sur les entreprises et le bureau d’études chargé de contrôler les travaux. Mais la juge estime aujourd’hui que la vénérable institution est aussi responsable de ce terrible drame.
Aujourd’hui, l’épilogue judiciaire semble un peu lointain. Depuis, l’Hôpital Georges-Pompidou est devenu une référence mondiale, notamment en cardiologie. « Franchement, je n’y croyais plus, je ne savais même pas que l’enquête était toujours en cours », explique Christiane Dodier, qui a porté plainte après la mort de son mari, Christian, le 5 février 2001.
Entré à l’Hôpital Georges-Pompidou pour une intervention en lien avec un cancer de la prostate, il en est ressorti atteint de légionellose. Il est mort trois mois plus tard. Les examens ont prouvé qu’il avait bien été contaminé par la maladie, mais l’hôpital conteste que c’est l’origine de son décès. « Je n’ai eu aucune excuse, rien! regrette Christiane. Le décès de mon mari à 61 ans a ruiné ma vie. Le fait qu’il y ait un procès est une bonne chose évidemment, mais cette affaire a détruit ma confiance dans le système de soins et les médecins. Ils ont vraiment laissé tomber mon mari. » Contacté hier, l’AP-HP a indiqué « ne pas vouloir faire de commentaires, car la procédure est encore en cours ».
http://www.leparisien.fr/faits-divers/vers-un-proces-de-la-legionellose-a-l-hopital-georges-pompidou-26-01-2013-2514555.php
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