Il prête sa voiture: il donne la mort

Un jeune de 18 ans à peine prête sa voiture à un copain de 16 ans et demi, le 9 uin 2012 à Villers-Bretonneux, près d'Amiens. Au bout du chemin, il y a la mort.

Un jeune né en 1994 a comparu hier devant le tribunal correctionnel d'Amiens pour homicide involontaire. Originalité du dossier : il n'est pas reproché à Florian d'avoir causé la mort d'un autre automobiliste par sa propre conduite, mais en confiant les clefs de sa voiture à un copain de 16 ans.

«Il me l'avait demandé plusieurs fois dans la soirée. J'ai fini par céder. Pour moi, il savait conduire. Il conduisait le tracteur et parfois la voiture de son père. Je sais maintenant que je n'aurais pas dû », confie Florian, un petit jeune en recherche d'emploi, qui vit chez sa mère.

La soirée du 9 juin 2012 avait pourtant bien commencé, pour quatre jeunes gens, amis parfois depuis le collège, qui partagent un repas au kebab de Villers-Bretonneux. «Des jeunes bien, respectueux, sans problème », témoigne le restaurateur. L'enquête démontrera d'ailleurs que personne n'a consommé ni alcool, ni stupéfiants.

Sébastien, qui vient de commencer la conduite accompagnée, presse Florian de lui prêter sa Clio Sport, fraîchement acquise. La petite bande décide finalement d'emprunter, sans demander d'autorisation, le tracteur du père de Florian. Les deux véhicules prennent la direction de champs, entre Villers-Bretonneux et Cachy. Là, Florian accepte d'inverser les volants, mais c'est la Renault qui suit le tracteur, sur un aller-retour. Il est presque l'heure de se séparer. « Il m'a demandé de conduire une dernière fois, je lui ai dit "Fais pas le con" », se souvient Florian.

Cette fois, sur le chemin communal, la Clio est devant, avec Sébastien et un autre copain. Elle échappe rapidement à la vue des deux passagers de l'engin agricole. Florian pousse les gaz. Son passager expliquera aux gendarmes : «J'ai vu 140 au compteur. J'ai dit "Regarde le compteur, ralentis !" Il a freiné mais c'était trop tard ». Dans une courbe à gauche, la voiture quitte sa trajectoire, percute un arbre qui la renvoie contre un autre tronc. Loin derrière, les deux amis en tracteur s'inquiètent, cherchent, rameutent d'autres copains. Le passager de la Clio se souvient : «J'ai entendu mon portable sonner mais il était coincé. J'étais comme dans un rêve, je ne sentais plus mes jambes. Sébastien avait la tête contre le volant, il émettait des grognements, il vomissait le sang. Son téléphone aussi sonnait ».

Sébastien, 16 ans, ce jeune homme plein de vie qui ambitionnait de reprendre la ferme familiale en association avec sa sœur, mourra à l'hôpital. Son passager, 15 ans, a survécu mais l'ampleur de ses séquelles n'est pas encore connue.

Reste Florian. Pour l'avocate de la partie civile et le parquet, qui requiert du sursis et une suspension de permis, il est responsable d'homicide involontaire en ayant confié une voiture à un ami qu'il savait sans permis. Pour son conseil, Me Bacquet-Bréhan, qui comprend qu'un coupable soit «nécessaire » aux parents, le prêt de ces maudites clefs n'est pas la cause directe du drame, mais bien plutôt la vitesse, que Florian ne pouvait prédire en laissant sa voiture à Sébastien.

Le jugement sera rendu jeudi prochain.

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