condamner à quinze ans de réclusion criminelle Frantisek Skrecek, ce Tchèque de 41 ans qui niait être impliqué dans le meurtre de Denis Respaut, un habitant de Carnon, disparu depuis le 18 mai 2010.
Auparavant, son avocate Me Chalié avait plaidé l'acquittement, tandis que l'avocat général Manon Brignol avait requis quinze ans de réclusion criminelle.
Résumé de la journée d'audienceA la cour d'assises de l'Hérault, l'avocat général Manon Brignol a demandé ce mercredi 12 février une peine de quinze années de réclusion criminelle contre Frantisek Skrecek, ce Tchèque de 41 ans accusé d'avoir donné la mort en mai 2010 à Denis Respaut, un habitant de Carnon alcoolique et invalide.
"Le meurtre est parfaitement établi, sa culpabilité est indiscutable. Denis Respaut ne s'est pas suicidé, Skrecek est le dernier à l'avoir vu vivant et ses explications sur la mort de Denis Respaut ne sont pas vraisemblables", estime la magistrate.
Marion Brignol s'est attachée à combattre le portrait de la victime fait par l'accusé
Dans son réquisitoire de près d'une heure, elle s'est attachée à combattre le portrait de la victime fait par l'accusé. "Denis Respaut n'était pas un homme suicidaire, a-t-elle insisté. Il allait mal, mais essayait de positiver. Ses derniers courriers n'étaient pas du tout ceux d'un homme qui n'attend plus rien de la vie." Et d'enchaîner : "Puisqu'il n'as pas voulu se suicider, sa disparition est nécessairement le fruit d'un meurtre."
Denis Respaut, la victime (DOCUMENT FRANCOIS BARRERE).
Elle a ensuite combattu les deux thèses successivement avancées par Frantisek Skrecek : celle d'une mort que la victime, en grand délabrement physique, lui aurait demandé de lui infliger sur la plage de Carnon, et celle du suicide en allant se noyer en mer, où son corps aurait disparu.
"On a presque envie d'y croire, à cette histoire"
"La première version du meurtre est très séduisante, romanesque, lance Manon Brignol. On a presque envie d'y croire, à cette histoire. Une version presque romantique, qui fait penser au film Amour de Mickael Hanneke, où un homme décide de donner la mort à sa femme dans un geste qui est plus de l'amour que de la violence. Mais Skrecek n'est pas Jean-Louis Trintignan, et Denis Respaut n'est pas Emmanuel Riva. Cette scène absolument extravagante relatée par Frantisek Skrecek, qui a décidé d'emmener le corps de sa victime au large, en vidant les poumons de sa victime de l'air qu'il contenait, et qui en faisant une bouée avec son pantalon a nagé pendant plusieurs centaines de mètres, sous le clair de lune ? Si tel était le cas, le corps aurait été retrouvé dès le lendemain matin, grace aux courants. »
"Un homme qui veut se suicider se serait lesté le plus possible"
Même certitude pour le second récit de l'accusé : "Denis Respaut était incapable de s'avancer sans sa béquille. On veut nous faire croire qu'il a été capable d'avancer malgré la peur, le désespoir, sur un sable forcément mouvant, jusqu'à une profondeur dont il ne se serait jamais revenu ? Dans cette hypothèse, pourquoi se serait-il déshabillé ? Ce n'était pas un bain de minuit. Un homme qui veut se suicider se serait lesté le plus possible, et aurait gardé ses chaussures au pied." Certes, reconnaît la magistrate, "l'affaire présente des zones d'ombres, des énigmes. Le corps n'a jamais été retrouvé, mais n'imaginez pas que parce qu'on n'a pas de corps, on n'a pas de meurtre. C'est parce que le meurtrier l'a caché. Cela n'empêche pas de le condamner."
Skrecek plaide l'acquittement, le jury part délibérer.
Le jury de la cour d'assises de l'Hérault vient de se retirer pour déliberer et décider de la culpabilité ou de l'innocence de Frantisek Skrecek, dont la défense a demandé mercredi après-midi avec conviction l'acquittement. Auparavant, l'avocat général avait requis quinze ans de réclusion criminelle à son encontre, pour le meurtre de Denis Respaut à Carnon en mai 2010. "On vous réclame 15 ans sur des suppositions, sur des considérations intellectuelles, et l'avocate générale nous avoue qu'il n'y a pas de mobile " annonce d'emblée Me Raphaëlle Chalié. Puis l'avocate déroule le fil de ce qui est pour elle la clé de ce dossier : la psychologie particulière de cet homme qui a avoué un crime, avant de se rétracter. "C'est pour lui le dossier de l'expiation. Il se sent coupable, il doit expier » dit-elle. Il a deux motifs pour expier : sa femme qu'il n'a pas pu sauver, et son ami qu'il n'a pas pu sauver. Il se hait. Il écrit au juge d'application des peines : attention, ni remise , ni grâce, je veux expier jusqu'au bout. Tout comme un mois après les faits, il provoque la police, car il veut mourir debout, car il n'a pu accomplir ses deux missions : sa femme, ce soleil qui s'éteint, et son ami ".
Ces aveux, c'est la peur de repartir en Tchéquie, où il est "recherché par la mafia" qui les provoque. "Entre la prison en France et la mort en Tchéquie, le choix est vite fait."
Pour l'avocate, c'est bien le dernier scenario raconté par l'accusé, qui n'a pas retrouvé Denis Respaut sur la plage où il l'avait laissé, désespéré, qui est le plus crédible.
"Acceptez l'idée que cet homme qui était dans un état de fragilité extrême, qui a le sentiment que sa vie peut se terminer dans un hôpital, qui vient de se faire humilier, se retrouve face à la mer, pendant que Skrecek s'en va, après lui avoir dit 't'as qu'à te mettre à la baille". Frantisek Skrecek a envisagé l’hypothèse qu'il s'est avancé dans l'eau. C'était un homme qui connaissait la mer, qui pêchait, et qui a pu se laisser porter. On a demandé si un corps peut dériver suffisamment pour partir au loin et dériver sans avoir pu être retrouvé. La réponse a été oui.
Et l'avocate enchaîne : " Le mobile ? Aucun. L'argent ? Non. Denis n'en avait pas. Alors c'est quoi ? La jalousie ? Non, ces deux hommes s'entendaient bien. " puis elle conclut : "Cet homme est un homme d'honneur. Il n'a plus à expier. Il a compris que la mort de sa femme, il ne pouvait rien y faire. Il a compris que la mort de Denis Respaut, cette deuxième mission à laquelle il a échoué, c'était mission impossible. Il a compris qu'il n'est plus recherché en Tchéquie. Qu'il peut ressortir libre de la maison d'arrêt. Est-ce que vous allez le déclarer coupable sur des suppositions avec une absence de mobile, ou est-ce que votre intime conviction doit vous amener à envisager l'hypothèse du suicide ? Vous savez que s'il sort demain il ne sera pas dangereux."
Après deux heures de délibéré, la cour d'assises de l'Hérault vient de condamner à quinze ans de réclusion criminelle Frantisek Skrecek, ce Tchèque de 41 ans qui niait être impliqué dans le meurtre de Denis Respaut, un habitant de Carnon, disparu depuis le 18 mai 2010. Auparavant, son avocate Me Chalié avait plaidé l'acquittement, tandis que l'avocat général Manon Brignol avait requis quinze ans de réclusion criminelle.
http://www.midilibre.fr/2014/02/12/assises-de-l-herault-15-ans-requis-contre-frantisek-skrecek,821215.php
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