mercredi 21 septembre 2011

Marseille : la maison croule sous les ordures depuis des mois

De la rue, c'est le genre de propriété dont rêveraient, a priori, la plupart des Marseillais. Une jolie maison sur deux niveaux, un jardin arboré juste en face du parc de la Moline: le 23 boulevard Marius-Richard (12e) est pourtant devenu le cauchemar des habitants du quartier. Pour mieux comprendre, il suffit de pousser le portail vert: derrière, la vision est celle d'un lieu dévasté, dirait-on, par une tornade, un tsunami.
Meubles entassés et brisés, vêtements, électroménager défoncé, vélos, poussettes, disques de jazz et de Brahms, albums photos, des tonnes d'objets enchevêtrés. Une vieille Renault Fuego disparait même presqu'entièrement sous les détritus. Un spectacle de désolation.

"Vous vous rendez compte si le feu prend là-dedans ?" souffle une voisine, accablée. Le locataire de cette propriété de la Ville, appelons-le Monsieur Jean, lui, n'est pas là : mercredi, après une nouvelle crise de démence, il a été interné d'office. Ce soir-là, "il courait tout nu dans la rue avec un marteau", rapporte Gérard Audibert, l'adjoint de secteur à la sécurité. Béatrice, une voisine, se souvient qu'une autre fois, il avait "attaqué les poteaux téléphoniques à la hache"...

Dans le quartier, pourtant, personne n'a peur de Monsieur Jean : "Il ne s'en est jamais pris à personne, assurent les voisins. Mais à jeter ses meubles par les fenêtres du premier étage dans la rue, un jour il blessera quelqu'un." Jean-Claude, enseignant à la retraite, est sans doute celui qui le connaissait le mieux : "Je venais chaque matin lui porter du pain, parfois d'autres choses à manger, raconte-t-il. Le pauvre : dans la maison, il n'y avait rien, il vivait sur un matelas avec une gamelle à côté."
Depuis longtemps, l'eau et l'électricité avaient été coupées. Le toit, défoncé, laissait entrer la pluie, le froid : "Au rez-de-chaussée il y a 30 cm d'eau sur le sol", assure, désolée, la mairie des 11e et 12e arr. Depuis un an, alerté par les habitants, le maire de secteur Robert Assante, tentait de faire intervenir la Ville, "d'abord pour qu'elle répare son bien, cette maison, qui est dans un état épouvantable"; ensuite pour évacuer les tonnes de déchets accumulés dans le jardin.
Pour l'heure, ces démarches étaient restées vaines. "Personne ne doit vivre dans ces conditions", s'énerve l'élu. Mais comment faire ? Monsieur Jean paye son loyer, 50 € par mois, depuis 28 ans. La plupart du temps, "il ne cause de tort à personne", jurent ses voisins. "Mais il ne prenait plus ses cachets, explique Jean-Claude, il disait que Dieu le lui interdisait..." En 1994, Monsieur Jean avait créé une association de "charité chrétienne" dont il est encore le président aujourd'hui; il récupérait des petits dons, des vêtements, pour "aider les plus démunis"; en 2008, il organisait encore des arbres de Noël pour les enfants.
http://www.laprovence.com/article/a-la-une/marseille-la-maison-croule-sous-les-ordures-depuis-des-mois

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