Je n'aurais pas aimé être le patient à qui je piquais le genou après le passage des gitans car certainement ma main tremblait».
Une dizaine de médecins, généralistes, spécialistes, se sont succédé, hier, à la barre du tribunal correctionnel de Grasse. Ils étaient entendus dans le cadre d'une vaste escroquerie à la Caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM) qui a duré de 2009 à 2012.
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D'une voix quasi unanime, ils ont confirmé la crainte que leur inspirait la communauté des gens du voyage ; ce qui les poussait à rédiger des ordonnances de complaisance.
« Ils débarquaient au cabinet à deux ou trois, à l'improviste, sans jamais prendre rendez-vous et ne voulaient pas attendre leur tour », insiste un rhumatologue de Cagnes-sur-Mer.
« Ils faisaient du bruit, j'essayais de les expédier entre deux patients», raconte un autre praticien cagnois.
« Pour avoir la paix,résume le procureur Philippe Vique,vous acceptiez de prescrire des médicaments à des patients que vous n'aviez jamais consultés ».
«Certains venaient avec une liste de médicaments. Ils disaient que leur médecin traitant était absent », explique une généraliste de Saint-Paul-de-Vence.
« Je pensais qu'ils avaient vraiment besoin de ces médicaments. J'ignorais qu'il s'agissait d'une escroquerie», confirme un médecin de Cagnes-sur-Mer. Certains encaissaient, via la carte Vitale, des consultations fictives à 23 €.
« Chez moi, il n'y avait pas d'encaissement. Je faisais passer ça en consultation gratuite », ajoute un médecin qui nie l'escroquerie.
« Des gens comme tout le monde ! »
« Arrêtez de dire qu'on mettait la pression. On est des gens comme tout le monde » proteste, sur le banc des prévenus, l'un des gitans poursuivis.
Une fois l'ordonnance en main, les « patients » courraient à la pharmacie de L'Abbaye, à La Colle-sur-Loup où le gérant de l'officine, Bertrand Bobo, facturait à la Caisse primaire d'assurance-maladie via les cartes Vitale souvent usurpées à des connaissances, le prix des médicaments onéreux, avant de reverser 30 % de la transaction aux malades imaginaires.
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«J'ignorais ce qui se passait ensuite dans cette pharmacie. Que ces ordonnances soient détournées de leur usage, pour moi ça dépasse l'entendement, insiste le rhumatologue. J'espérais recevoir un coup de fil de la CPAM, m'indiquant qu'il y avait une anomalie. J'aurais aimé une main tendue ».
« Vous n'aviez qu'à aller voir les gendarmes. La main, ils vous l'auraient tendue », rétorque le procureur.
« Ce n'est pas dans la culture médicale », indique un médecin Villeneuvois.
« Est-ce dans la culture médicale que de rédiger des ordonnances sans ausculter les patients », intervientle président Marc Joando.
Aujourd'hui le tribunal entendra les réquisitions du procureur et les plaidoiries de la défense.
http://www.nicematin.com/cagnes-sur-mer/les-faux-malades-de-plusieurs-medecins-du-bassin-cagnois.1807059.html
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