mercredi 16 septembre 2015

Enlevé puis séquestré en Espagne : 7 semaines en enfer pour un homme d'affaires toulousain

Cela devait être un simple rendez-vous d'affaire. Un de plus en cette fin de mois de mai. Une prise de contact avec un propriétaire qui se disait prêt à céder à bon prix des terrains quelque part dans l'agglomération toulousaine. La «cible» ne se doutait de rien. Surtout pas du piège qui lentement se refermait. Il n'y a jamais eu de discussion, encore moins d'affaire. À peine la main serrée, «Monsieur X» s'est retrouvé dans une voiture, menacé, rudoyé. Le début de l'enfer. Cela va durer sept semaines.
Fin juillet à Toulouse : la chaleur assomme la ville. Au parquet, un signalement arrive sur le bureau d'un procureur. Un banquier s'inquiète des mouvements «importants» qui concernent le compte d'un de ses clients. Plusieurs dizaines de milliers d'euros ont été transférées ces dernières semaines. Le banquier n'est pas vraiment inquiet, les comptes demeurent largement positifs. Mais quand même. Le parquet transmet aux enquêteurs de la section recherches de la gendarmerie de Toulouse «pour vérification». L'enquête démarre.
Les gendarmes prennent contact avec «Monsieur X», titulaire des comptes. L'homme, simple malgré une assise financière très large, ne se montre pas très causant, pas décidé à déposer plainte, encore moins à expliquer ce qui s'est passé. Étrange. Parce que son amie, qui le voit régulièrement mais ne vit pas avec lui, a deviné que quelque chose bloque. «Monsieur X» ne lui a rien dit mais elle sent bien que cet homme n'est plus vraiment le même depuis qu'il est rentré du sud de l'Espagne, mi-juillet après plusieurs semaines de vacances.

Un camping-car pour passer inaperçu

Les enquêteurs insistent, le poussent à se confier. Il refuse longtemps de déposer plainte mais fini par raconter son calvaire et son incroyable séquestration. Elle a commencé le vendredi 22 mai quand le rendez-vous d'affaire s'est transformé en traquenard. Enlevé par au moins deux hommes, peut-être trois. Ils parlent fort, mal, menacent. «Monsieur X» ne comprend rien. Devant lui, ces hommes la cinquantaine marquée semblent tout savoir, tout connaître de sa vie, de son argent.
Après un court trajet en voiture, la victime est jetée dans une cave, dans une maison de la banlieue toulousaine. Il ne comprend pas. Pendant que dans le noir son cœur bat la chamade, l'angoisse le gagne. Les ravisseurs passent à son domicile. Ils emportent tout ce qui peut servir : téléphone, ordinateur, cartes bancaires. Pas un cambriolage classique, de ceux qui laissent des traces. Non plutôt un nettoyage comme si le propriétaire avait décidé de s'éloigner, de prendre des vacances,
Dans la cave, les yeux bandés, l'otage aperçoit des hommes encagoulés et répond à moult questions. Ils veulent savoir. Tout. Notamment son code secret pour sa carte bancaire. Est-ce une simple extorsion ? «Monsieur X» patauge, s'angoisse. Il s'affole de ces gens qui lui hurlent dessus, le menacent, promettent de «lui faire la peau», claquent les portes… Les minutes durent des heures. Après la carte ils veulent les codes pour réaliser des transferts bancaires. Combien de temps s'écoule lors de cette première séquestration dans une cave ? Un jour, deux, peut-être trois. Et toujours ces voix qui menacent, ces cris qui font écho dans le noir et la mort qui rôde.
Les yeux toujours bandés, «Monsieur X» est extrait de sa prison. Sans ménagement, on le jette dans un camping-car. Un véhicule comme on en croise des centaines sur les routes des vacances. L'homme l'ignore mais il vient de réaliser un virement bancaire pour acheter le véhicule ! Du côté de Perpignan, la vendeuse ne voulait pas de chèque. Elle a reçu les 35 000 € réclamés sur son compte, et a donné les clefs, rassurée. Et maintenant, c'est comme un touriste, serré de très près par ses geôliers, que le kidnappé et ses ravisseurs passent les Pyrénées. Nouvelle maison du côté de Gérone, en bord de mer. Nouvelle cave, nouvelles angoisses. Les menaces toujours, la nourriture trop rare, la saleté…

Il rentre chez lui au volant de sa voiture

L'homme n'en peut plus de ces jours sans fin d'humiliation, de peur. On le force à envoyer des messages et même à téléphoner à sa compagne, restée à Toulouse. Il doit jouer les vacanciers, jouer le jeu. La destinataire croit que son ami respire loin de Toulouse, sans imaginer la détresse dans lequel se trouve cet homme de 56 ans. Ses ravisseurs l'obligent à multiplier les virements, à acheter de l'or. Il veut en finir, respirer. Les voyous, arme à la ceinture, ne lâchent rien, exigent toujours, changent encore de cachette. Combien de fois ? Au moins trois, peut-être plus. De maisons en appartements, direction le sud. Les contraintes ne changent pas malgré les virements qui s'accumulent vers les paradis fiscaux.
Quand enfin la porte s'ouvre, «Monsieur X» n'en croit pas ses yeux. Il se trouve à San Pedro d'Alcantara, au sud de l'Espagne, du côté de Marbella. Il a déjà versé plus d'un million d'euros. Nous sommes le 13 juillet. Il peut rentrer chez lui au volant de sa propre voiture mais les voyous le préviennent : un mot et c'est la mort ! Ils ont déjà obtenu 1,3 million d'euros. «Si tu veux rester en vie, c'est 100 000 € par semaine jusqu'à 2 millions». «Monsieur X» promet. Ce n'est pas lui qui arrêtera les virements.
Une fois convaincu de parler par les gendarmes de la SR de Toulouse, ce Toulousain terrorisé a été envoyé loin de chez lui et de l'Espagne, le temps de remonter les pistes des malfaiteurs. De vraies vacances cette fois mais pas simple à vivre pour la victime, traumatisée par ces sept semaines en enfer. Lundi 7 septembre, les arrestations à Toulouse et Marbella lui ont offert un formidable soulagement. Enfin.

http://www.ladepeche.fr/article/2015/09/16/2178195-convoquee-devant-tribunal-hoda-star-ac-disparu.html

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